Loi travail : une bataille qui ne fait que commencer

C’est avec un grand regret que j’ai du constater l’échec du dépôt de la motion de censure citoyenne pour lutter contre la loi travail et la politique du Gouvernement. J’ai néanmoins saisi le Conseil Constitutionnel avec 40 autres députés. La droite ayant décidé également de former des recours, nos requêtes s’additionneront à leurs griefs pour recueillir le seuil des 60 noms. La bataille ne fait donc que commencer et se poursuivra le 15 septembre avec la mobilisation populaire.

Voici le communiqué de mon groupe parlementaire du Front de Gauche.

Échec de la motion de censure Citoyenne
Un manque de courage politique pour empêcher l’adoption de la loi travail

motion censure citoyenne

motion de censure citoyenne

Ce mercredi, le Gouvernement a décidé de recourir à l’article 49-3 pour la troisième fois consécutive et faire ainsi adopter sa loi travail en lecture définitive.
Ce choix, brutal et antidémocratique car privant la représentation nationale de toute discussion dans l’Hémicycle, n’a laissé à nouveau qu’une seule option aux députés réellement opposés à ce texte : l’adoption d’une motion de censure.

En première et en nouvelle lecture, nos tentatives pour réunir les 58 signatures nécessaires au dépôt de cette motion ont échoué. Déplorant cette impasse, nous avons choisi cette fois-ci de porter la motion de censure dite « Citoyenne » élaborée par les « Nuit Debout », en espérant atteindre le seuil de signatures requis.
Ne récoltant que 28 signatures, cette tentative est un nouvel échec : il n’y a donc pas de motion de censure déposée. Nous le regrettons, d’autant plus que cette initiative transpartisane, fondée sur le refus du passage en force et le respect de la démocratie, aurait dû rassembler largement.
Malgré l’adoption de cette loi de casse du code du travail, la mobilisation continue. Nous ne lâcherons rien ! Nous utiliserons tous les moyens institutionnels pour obtenir le retrait de ce texte et nous serons présents aux côtés des salariés le 15 septembre prochain pour la journée d’action interprofessionnelle décidée par l’intersyndicale.

Les signataires :
Laurence Abeille, Pouria Amirshahi, François Asensi, Isabelle Attard, Danielle Auroi, Alain Bocquet, Marie-George Buffet, Jean-Jacques Candelier, Fanélie Carrey-Conte, Patrice Carvalho, Gaby Charroux, André Chassaigne, Sergio Coronado, Cécile Duflot, Jacqueline Fraysse, Edith Gueugneau, Christian Hutin, Jean Lassalle, Jean-Luc Laurent, Christophe Léonard, Noël Mamère, Philippe Noguès, Christian Paul, Barbara Romagnan, Jean-Louis Roumegas, Nicolas Sansu, Eva Sas, Paola Zanetti.


Saisine du Conseil Constitutionnel

Pour obtenir le rejet de ce texte de régression sociale, j’ai signé la saisine du Conseil Constitutionnel avec 40 autres député-e-s. Pour être recevable, cette saisine doit être présentée par au moins 60 députés ou 60 sénateurs. La droite ayant décidé également de former des recours, nos requêtes s’additionneront à leurs griefs.

> Pour lire la saisine, cliquez ici : saisine conseil constitutionnel loi travail.


Tribune – Loi travail : la bataille ne fait que commencer.

Ci dessous, la tribune que j’ai signé avec certains collègues parlementaires. Je regrette que les 58 signataires de cette tribune n’aient pas tous eu le courage politique de soutenir la motion de censure citoyenne afin de mettre leurs propos en adéquation avec leurs actes et lutter de manière effective contre la loi travail.


49-3Ce mercredi 20 juillet, la loi Travail a donc été définitivement adoptée avec un nouveau recours au 49-3. Au cœur de l’été, il ne faut pas lâcher, mais continuer à dire pourquoi ce fut le moment le plus insupportable de ce quinquennat pour qui ne se résigne pas à la dégradation des droits des salariés français et au déni de démocratie.

Avec cette loi, le code du Travail sera plus complexe, et moins favorable aux salariés. Cette loi ne modernise pas, elle réduit les protections. Et derrière le motif légitime de favoriser la négociation sociale, en réalité elle fragilise les travailleurs et affaiblit la démocratie dans l’entreprise.

Elle est adoptée sans dialogue et négociations apaisés avec les partenaires sociaux. Sans le soutien des citoyennes et des citoyens, qui continuent très majoritairement à rejeter un texte  aux antipodes des engagements pris par la majorité pour laquelle ils ont voté en 2012. Sans un débat parlementaire à la hauteur des cinquante-deux articles et des nombreux thèmes abordés dans ce projet de loi, visant à terme la réécriture de l’ensemble de la partie législative du Code du Travail. Sans même un vote des députés, sur chaque article ou sur l’ensemble du texte.

Mais bien après plusieurs mois de tensions sociales sans précédents pour un gouvernement issu de la gauche, par le biais d’un recours au 49-3, outil quasi-imparable de verrouillage et de chantage constitutionnel. Et sans plus de quelques heures de débat dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, désormais devenu un théâtre d’ombres.

Jamais nous n’aurions imaginé vivre au cours de ce quinquennat une telle situation, tellement contraire aux valeurs et à l’histoire de la gauche. Elle nourrit la colère du peuple, et donne des arguments à ceux qui s’emploient à dévitaliser la démocratie.

Nous, parlementaires avons à chaque étape décidé de nous mobiliser, pour être à la hauteur de notre responsabilité : celle d’incarner le pouvoir de faire la loi en accord avec le mandat que nous a confié le peuple.

Nous n’avons cessé de dénoncer les dangers de ce texte, en considérant que ses quelques points positifs ne pouvaient servir de prétexte à justifier ses reculs considérables.

Nous avons en permanence recherché et organisé le dialogue, avec toutes les organisations syndicales, sans ostracisme ni stigmatisation ; relayé les propositions et alternatives ; et jusqu’au bout, œuvré à une sortie de crise, pourtant à portée de main.

Enfin, par deux fois, face au passage en force de l’exécutif sur ce texte fondamental, il a été tenté de déposer une motion de censure de gauche, démocrate et écologiste : il était de notre responsabilité de députés de la Nation de ne pas rester sans réaction face à cette situation. Nous le devions à celles et ceux qui pendant des mois se sont mobilisés par millions.

La voie autoritaire, aura permis au Président de la République et au Gouvernement de faire fi de toutes les oppositions, pourtant majoritaires dans le pays, de toutes les mobilisations, qu’elles soient citoyennes, syndicales, parlementaires.

Mais à quel prix ? Au nom de quel idéal, pour servir quel projet de société ? Avec quelles conséquences pour le pays ?

Comment ne pas voir, à l’heure où notre société traverse une crise démocratique majeure, que faire adopter sans vote, par le  49-3 utilisé à deux reprises, un tel projet de loi, concernant la vie quotidienne de millions de nos concitoyens, risque d’accroître ce fossé entre citoyens et gouvernants que nous prétendons tous combattre ?

Comment ne pas comprendre, six mois après des débats délétères sur la déchéance de nationalité, que l’on altère une nouvelle fois la confiance du peuple, en imposant un texte dont les dispositions vont à rebours des positions toujours défendues en matière de droit du Travail ?

Pourquoi faire le choix de diviser un pays pour faire passer à tout prix un texte qui de l’avis même de ses concepteurs n’aura pas d’impact direct sur les créations d’emplois ?

Pourquoi imposer des mesures qui aggraveront les logiques de dumping social entre les entreprises, affaibliront le pouvoir d’achat des salariés à travers les baisses de rémunération des heures supplémentaires, et faciliteront les licenciements économiques, ou même réduiront les missions de la médecine du travail ?

Le Président de la République et le gouvernement devront longtemps faire face à ces questions. Car cette méthode autoritaire n’éteindra jamais le débat de fond. Pire, elle est toujours contre-productive, par les ressentiments qu’elle génère.

Pour notre part, nous ne renonçons pas à porter la voix des citoyens mobilisés pour défendre leurs droits, leurs convictions, leur vision de la société et du monde du travail. Et surtout, nous ne renonçons pas à affirmer d’autres choix. Pour adapter le droit du travail aux défis du 21ème siècle et aux mutations de l’économie, en le rendant plus protecteur pour les salariés, en dressant ainsi une véritable barrière contre le dumping social au sein de l’économie française ; en renforçant le dialogue social, le rôle des organisations syndicales, et la place des salariés dans les organes de décision des entreprises; en renouant avec une démarche de partage juste et choisi du temps de travail, levier d’une lutte efficace contre le chômage; en se donnant tous les moyens de dessiner effectivement les conquêtes sociales de demain, avec au premier rang la sécurité sociale professionnelle.

Un code moderne et vraiment protecteur des salariés est possible. Il doit s’inspirer des leçons de l’Histoire et affronter les mutations du salariat. Nous retrouverons ainsi le chemin des réformes qui marquent utilement leur époque.

On aurait tort de croire le débat clos avec l’adoption de la loi Travail. Il ne fait au contraire que commencer. Nous y prendrons toute notre part.

Laurence Abeille, Brigitte Allain, Pouria Amirshahi, François Asensi, Isabelle Attard, Danielle Auroi, Philippe Baumel, Laurent Baumel, Huguette Bello, Jean-Pierre Blazy, Michèle Bonneton, Alain Bocquet, Kheira Bouziane, Isabelle Bruneau, Marie-George Buffet, Jean-Jacques Candelier, Fanélie Carrey-Conte, Patrice Carvalho, Nathalie Chabanne, Gaby Charroux, André Chassaigne, Dominique Chauvel, Pascal Cherki, Sergio Coronado, Marc Dolez, Cécile Duflot, Hervé Feron, Aurélie Filippetti, Jacqueline Fraysse, Geneviève Gaillard, Yann Galut, Linda Gourjade, Edith Gueugneau, Benoît Hamon, Mathieu Hanotin, Christian Hutin, Romain Joron, Régis Juanico, Jérôme Lambert, Jean Lassalle, Christophe Léonard, Jean-Luc Laurent, Noël Mamère, Alfred Marie-Jeanne, Jean-Philippe Nilor, Philippe Noguès, Christian Paul, Michel Pouzol, Patrice Prat, Barbara Romagnan, Jean-Louis Roumegas, Nicolas Sansu, Eva Sas, Gérard Sebaoun, Suzanne Tallard, Thomas Thévenoud, Michel Vergnier, Paola Zanetti

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