Proposition de loi en faveur des buralistes frontaliers.

Aujourd’hui a eu lieu une hausse des taxes sur le tabac, surtout répercutée sur le prix du tabac à rouler qui devrait augmenter en moyenne de 15 %.

Je me joins à la colère des buralistes frontaliers qui sont soumis à une concurrence déloyale de la part des pays voisins de la France. Il faut impérativement que se tienne un moratoire sur les prix du tabac en Europe, afin que les différents pays arrivent à harmoniser le prix du tabac.
C’est tout le sens de la proposition de loi que je viens de déposer à l’Assemblée nationale.

(voir ci-dessous)

buralistes-en-colere

 ASSEMBLEE NATIONALE

 CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

 QUATORZIEME LEGISLATURE

 PROPOSITION DE LOI

 Visant à protéger les buralistes frontaliers

  Présentée par :

 Jean-Jacques CANDELIER,  Député

EXPOSE DES MOTIFS

Les buralistes sont aujourd’hui dans une situation critique. Si les débits de tabac de France peuvent être en difficulté, ce sont surtout les établissements situés à proximité de la frontière qui sont en grande difficulté. Les raisons de leurs problèmes sont nombreuses.

Le premier problème rencontré par les buralistes, c’est la déstabilisation constante dans laquelle est placée la profession. Les décisions prises par les Gouvernements divergent, et la lutte contre le tabagisme ainsi que les politiques de santé publiques qui en découlent ne cessent de prendre des directions différentes. A l’arrivée, ce sont les débitants de tabac qui subissent ces décisions, qui les plongent dans le désarroi le plus total.

Il suffit de constater le nombre d’établissements qui ferment leurs portes pour s’en convaincre : 7000 depuis 2003, dont 662 rien que pour le Nord-Pas-de-Calais. Et les fermetures, loin de ralentir, ne font que s’accélérer. Il faut rappeler que chaque jour, ils accueillent plus de 10 millions de clients. Dans le pays entier, tant dans la France rurale que dans les grandes villes, le bureau de tabac qui fait souvent office de bar et marchand de journaux, est un lieu essentiel de convivialité, d’échange et de dialogue.

Avec son maillage commercial sans équivalence, les buralistes sont de véritables acteurs de l’aménagement du territoire. Dans les petites communes, il s’agit souvent du dernier établissement encore ouvert, leur rôle économique et social est majeur.

Pour toutes ces raisons, les buralistes ont besoin d’être soutenus et accompagnés pour que cesse l’hémorragie des fermetures et que la profession reprenne confiance. Le 15 novembre 2016, un protocole d’accord entre le Gouvernement et le Président de la Confédération nationale des buralistes a été signé. Celui-ci fait état de 4 axes majeurs :

  • la création d’une subvention de modernisation des bureaux de tabac
  • la mise en place d’un filet de sécurité pour les buralistes en difficulté
  • la hausse de la rémunération des buralistes en la passant progressivement de 6,9 % en 2016 à 8 % en 2021.
  • le versement d’une prime de diversification (soumise à conditions).

S’il représente certaines avancées, on peut toutefois déplorer l’insuffisance de ces mesures, notamment vis-à-vis des buralistes frontaliers. Ceux-ci restent totalement désemparés par d’autres décisions gouvernementales, comme la mise en place des paquets neutres qui génère déjà de grands risques d’erreurs pour les buralistes, mais aussi et surtout la hausse de la fiscalité prévue sur le tabac à rouler, afin de l’aligner sur le prix des cigarettes.

Il faut comprendre que les buralistes ne sont pas opposés aux politiques publiques de lutte contre le tabagisme. Si la profession reconnaît la nocivité du tabac notamment sur les plus jeunes, elle considère cependant que les décisions gouvernementales ne doivent pas se faire au détriment de la filière, qui est déjà frappée de plein fouet.

Signalons que M. Michel Sapin, Ministre de l’Economie et des Finances, affirmait à ce sujet le 18 septembre dernier qu’ « il n’était pas question d’augmenter les taxes sur le tabac ». Pourtant, quelques mois plus tard, les propos du Gouvernement vont en sens contraire, ce qui provoque un abattement et un découragement de la profession, qui se sent non pas accompagnée mais déstabilisée.

En cause : le décalage très élevé du prix du tabac entre la France et les autres pays européens. Par exemple, une bague de 30 grammes de tabac à rouler coûte 7,40 € en France, alors qu’elle coûte plus de deux fois moins cher, soit 3,60 € de l’autre côté de la frontière belge. Un peu plus loin, au Luxembourg, le tarif descend même à 2,85 €.

Comment nos buralistes français peuvent-ils lutter face à des prix aussi bas ? N’oublions pas que nous vivons dans une période de crise économique et sociale, et les fumeurs comme les autres citoyens, privilégient les solutions qui préservent et favorisent leur pouvoir d’achat. Augmenter le prix du tabac à rouler ne va qu’inciter davantage de fumeurs à se fournir en Belgique, quitte à parcourir des distances kilométriques de plus en plus importantes.

De l’autre côté de la frontière, les commerçants l’ont bien compris, et de véritables supermarchés du tabac ont ouvert leurs portes, qui ne désemplissent pas du matin au soir, avec une clientèle française massive et de plus en plus nombreuse.

Très concrètement, les buralistes frontaliers estiment à juste titre que les mesures décidées dans le protocole d’accord ne sont pas assez ciblées vers elles, et qu’elles sont largement insuffisantes. Par exemple, la remise compensatoire visant à pallier leur perte de ressources prenait en compte 2002 comme année de référence, alors que celle-ci est maintenant ramenée à 2012. C’est évidemment un manque à gagner pour les exploitants frontaliers.

En outre, dans un souci d’offrir toujours plus de services à la population locale, les buralistes se diversifient et proposent de nouveaux produits et services au sein de leurs établissements. Toutefois, ces activités ne sont pas toujours très rentables, et le montant de la prime de diversification n’est vraiment pas assez élevé (2 000 € aujourd’hui, à condition que les buralistes aient 5 activités, pour des communes comprenant moins de 2 000 habitants).

Par ailleurs, l’un des problèmes fondamentaux de la profession, c’est l’augmentation croissante de l’approvisionnement des Français sur le marché parallèle. Même si par définition, il est difficile d’avoir des chiffres fiables et vérifiés sur le marché noir, en France plus d’une cigarette sur quatre serait issue du circuit parallèle. Ce chiffre considérable est en constante augmentation, du fait des hausses constantes du prix du tabac, et d’une absence totale de l’efficacité des campagnes de lutte contre l’essor de ce marché noir.

Pour illustrer ce propos, soulignons que le nombre de cigarettes que les citoyens peuvent acheter à l’étranger et ramener sur le territoire national dans leurs automobiles est de quatre cartouches par personne. Sauf qu’avec la disparition des frontières et la saignée des effectifs dans la Douane française, l’Etat n’est plus en mesure de contrôler les achats des Français réalisés hors des frontières. Rien n’empêche un client de remplir son coffre avec des cigarettes achetées à bas coût, sans craindre que leur marchandise ne soit confisquée ni ne donne lieu au paiement d’une amende.

Mais surtout, les buralistes frontaliers sont unanimes : la seule solution qui pourrait à long terme permettre de sauver leur métier, serait de mettre en place un moratoire sur le prix du tabac et d’harmoniser le prix du paquet au niveau européen. En effet, le décalage est tel entre le prix du tabac en France et ses pays voisins (Belgique, Luxembourg, Espagne,…) que les buralistes français et particulièrement ceux qui sont frontaliers ne voient que cette solution, pour pouvoir avoir de la visibilité sur leur activité à long terme.

C’est tout le sens de cette présente proposition de loi : dresser des perspectives claires, soutenir et accompagner la profession, pour lui permettre de sortir de l’ornière.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

             Cette loi est destinée au soutien exclusif des buralistes frontaliers. Il faut éviter le saupoudrage des aides versées à l’ensemble des buralistes et aider avant tout les buralistes les plus fragiles. Or, comme exposé précédemment, ce sont les débits de tabac frontaliers qui sont les premiers à souffrir, notamment de la concurrence déloyale des pays voisins sur le prix du tabac.

Il est instauré une allocation pérenne et progressive aux buralistes frontaliers, suivant la localisation du débit de tabac par rapport à la frontière :

  • de 0 à 9 km de la frontière, les buralistes voient leurs indemnités compensatoires plafonnées à hauteur de 80 % de leurs pertes de ressources, en se basant sur 2002 comme année de référence.
  • de 10 à 19 km de la frontière, les buralistes voient leurs indemnités compensatoires plafonnées à hauteur de 70 % de leurs pertes de ressources, en se basant sur 2002 comme année de référence.
  • de 20 à 34 km de la frontière, les buralistes voient leurs indemnités compensatoires plafonnées à 50 % de leurs pertes de ressources, en se basant sur 2002 comme année de référence.
  • de 34 à 100 km de la frontière, les buralistes voient leurs indemnités compensatoires plafonnées à 30 % de leurs pertes de ressources, en se basant sur 2002 comme année de référence.

Article 2ème

             Le Gouvernement s’engage en mettre en place un moratoire sur le prix du tabac dans un délai de 2 mois. Les hausses successives de la fiscalité sur le tabac est la première cause des difficultés des buralistes, qui entraîne des fermetures de portes toujours plus nombreuses, année après année. Il est nécessaire de donner de la visibilité pour la profession, et d’établir avec précision quelles ont été et quelle seront les hausses successives du prix du tabac en France et leur impact sur la baisse de la consommation.

Article 3ème

             L’Etat français ouvre les débats au niveau européen pour préparer et organiser l’harmonisation fiscale sur le tabac dans tous les pays membres de l’Union européenne. Le décalage fiscal appliqué sur le tabac entraîne une concurrence déloyale entre les pays européens, il est impératif que les Gouvernements se mettent d’accord sur une fiscalité unique commune à tous les pays de la zone.

Article 4ème

             Le soutien budgétaire pour la profession se fera donc à périmètre constant.

En d’autres termes, l’ensemble des dépenses nouvelles occasionnées en faveur des buralistes frontaliers, qui sont les plus fragiles, seront dûment compensées sur l’enveloppe financière du soutien à cette profession. Le rééquilibrage des moyens alloués par le Gouvernement permettra de prioriser le soutien aux établissements frontaliers qui sont les plus fragiles au détriment des autres débits de tabac présents sur le territoire français, qui n’ont pas besoin du même filet de sécurité.

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